Les drames de la société ivoirienne

Juin 24, 2024 - 20:23
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« Les tentatives les plus flagrantes de confiscation du pouvoir se heurtent à des obstacles considérables au Sénégal, où la montée de la conscience citoyenne dans un contexte démocratique renforce la résistance populaire. En revanche, en Côte d'Ivoire, la pérennisation du pouvoir au-delà des mandats constitutionnels est facilitée par une société civile affaiblie, moins exigeante et passive ; par une classe politique corrompue qui ne travaille que pour sa propre survie ; par un collectif d’intellectuels déclassés qui s’indigne rarement, par une justice soumise ; et enfin, par une grande tolérance sociétale pour la violence politique. En somme, tout ce qui fait le nid des dictatures. Il devient évident que la vigueur de la conscience populaire, associée à la compréhension de ce qu’est la souveraineté du peuple, constitue un rempart crucial contre l'avènement d'un pouvoir dictatorial. Ainsi, la nature des dirigeants reflète inévitablement la maturité politique et la volonté démocratique de chaque peuple ». Diagnostic sans complaisance  de la sociétéivoirienne par le Think Tank-Mamadou Koulibaly en lien avec les dernières élections présidentielles au Sénégal.

La société ivoirienne est confrontée à de profondes plaies qui entravent son développement démocratique et social. Ces blessures se manifestent à travers une société civile affaiblie, une classe politique versatile, un collectif d'intellectuels déclassés, une justice soumise et une tolérance sociétale pour la violence politique.

Tout d’abord, la société civile ivoirienne est affaiblie. Elle semble moins exigeante et passive dans sa quête de justice et de transparence. Les mouvements sociaux sont moins nombreux et moins puissants, ce qui limite leur capacité à agir comme contrepoids aux abus de pouvoir. Une société civile forte et mobilisée est essentielle pour exercer une surveillance citoyenne et assurer que les droits et les intérêts de tous les citoyens soient protégés.

Ensuite, la classe politique en Côte d'Ivoire est en proie à la corruption. Les politiciens, au lieu de travailler pour le bien commun, sont souvent plus préoccupés par leur survie politique et leurs intérêts personnels. Cette corruption affaiblit la gouvernance et les institutions démocratiques, et empêche une redistribution équitable des ressources et des opportunités dans le pays.

De plus, le collectif d'intellectuels en Côte d'Ivoire semble souvent déclassé et silencieux face aux abus de pouvoir et aux injustices sociales. Les voix critiques et les analyses détaillées sont rares. Une société qui ne questionne pas et ne remet pas en cause les actions de ses dirigeants risquent de se retrouver dans une spirale où les abus de pouvoir deviennent la norme.

La justice, en tant que pilier fondamental de toute démocratie, doit être indépendante et autonome. Malheureusement, en Côte d'Ivoire, la justice semble souvent soumise à des pressions politiques et à des influences extérieures, ce qui remet en question son impartialité et son intégrité. Une justice faible et soumise ne peut pas assurer l'équité et la vérité, et crée un climat d'impunité qui nuit à la stabilité et à la confiance au sein de la société.

Enfin, la tolérance sociétale pour la violence politique est un autre obstacle à la progression démocratique de la société ivoirienne. Les actes de violence politique sont souvent perçus avec une certaine résignation, voire une certaine acceptation. Cela réduit la capacité de la société à débattre, à réclamer des réformes et à résoudre pacifiquement les conflits. La violence politique doit être condamnée collectivement et combattue avec détermination.

Ces drames sociaux ne sont pas insurmontables, mais elles nécessitent un réveil collectif et un engagement profond de tous les acteurs de la société ivoirienne. La société civile doit se mobiliser et renforcer ses capacités pour faire entendre sa voix, exiger une gouvernance transparente et responsable, et défendre les droits de tous les citoyens. Les politiciens doivent travailler pour le bien commun et non pour leur survie personnelle. Les intellectuels doivent retrouver leur voix critique et analytique pour éclairer les débats publics. La justice doit être protégée et soutenue dans son indépendance. Et la tolérance pour la violence politique doit être remplacée par une culture de dialogue et de paix.

Le réveil collectif est nécessaire pour guérir les plaies de la société ivoirienne. La démocratie et le progrès ne peuvent être réalisés sans l'engagement et la vigilance de tous. Il est temps d'agir et de travailler ensemble pour construire une Côte d'Ivoire juste, démocratique et prospère pour tous ses citoyens.

                             Elyse Konan

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